Le One Planet Summit s’est conclu par une série de décisions qui renforcent l’Accord de Paris. La Banque mondiale y a notamment annoncé la fin de ses aides aux énergies fossiles.

Le président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, a annoncé Mardi12 décembre 2017 après-midi, la fin des subventions aux projets d’extraction de pétrole et de gaz dès 2019. Le financier international rejoint ainsi le camp de ceux qui plaident pour qu’on laisse ces énergies fossiles dans le sol afin de ne pas aggraver les teneurs en CO2 dans l’atmosphère. Il met ainsi à mal la réalisation de bon nombre de projets qui ne peuvent se faire sans la garantie du financeur. L’engagement des banques internationales rassurent en effet les investisseurs privés. Les compagnies minières restent libres d’aller forer le sous-sol si leur gouvernement le permet. Mais ce sera sans couverture.

Ce rôle essentiel des banques multilatérales a été souligné tout au long de ce sommet climat destiné à célébrer les deux ans de l’accord de Paris à la COP21, le 12 décembre 2015. En deux ans, le bilan de l’action internationale n’est pas fameux. Après avoir stagnées pendant deux ans, les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de nouveau en 2016. “Nous sommes en train de perdre la bataille, s’est alarmé Emmanuel Macron, en préambule des débats menés en présence d’une cinquantaine de chefs d’États. On ne va pas assez vite et dans cinquante ou soixante ans, des chefs d’États ici présents auront disparu avec leur population.” Pour agir, il faut donc ne plus exploiter les énergies fossiles. Outre la Banque mondiale, l’assureur Axa a annoncé qu’il cesserait désormais de couvrir tous les investissements dans le pétrole et le gaz et a annoncé engager 12 milliards d’euros de projets verts d’ici à 2020.

Laisser le pétrole et le gaz sous terre

Il faut donc aussi financer tous les projets dans les énergies vertes non émettrices de CO2. Pour ce faire, les investisseurs s’appuient sur une “finance imaginative”. Les banques multilatérales d’aide au développement (comme l’Agence française de développement) revendiquent désormais collectivement un rôle de levier. “Notre rôle est d’inciter le secteur privé à s’engager dans les énergies renouvelables et les infrastructures qui rendront les villes plus résilientes, affirme ainsi Rémy Rioux, le Directeur Général de l’AFD. Nous devons limiter leurs risques en donnant à ces entreprises des garanties qu’elles ne perdront pas leurs investissements.”

Les obligations vertes ont également le vent en poupe avec 130 milliards d’euros engagés en 2017. Cela va très vite, aussi des avertissements se font entendre. Il va falloir surveiller l’utilisation de cet argent, qui pourrait être détourné vers d’autres usages moins écologiquement vertueux. La complexité de l’emploi des sommes qui sont en train de s’orienter vers le climat a été très fortement soulignée par les intervenants. Les financeurs redoutent que les investissements ne soient détournés de leur but initial ou terminent dans des circuits de corruption. Il faudra donc inventer des règles de surveillance ainsi qu’un système de mesure des tonnes de CO2 évitées grâce aux projets financés. Les bénéficiaires des fonds regrettent, au contraire, la lourdeur bureaucratique qui prévaut dans les arcanes bancaires et les retards dans le versement de fonds qui sont parfois urgents. “En 2016, un cyclone a provoqué à Haïti 2,7 milliards de dollars de dégâts. Nous avons reçu des assurances à ce jour 23 millions ”, a dénoncé Moïse Jovenel, le président de la république haïtien, présent à Paris.

Tenir compte du climat dans tous les projets d’investissements

Autre nouveauté : la reconnaissance du rôle des villes. Les municipalités regrettent aussi vivement de ne pas avoir d’accès à la finance internationale. “Si toutes les villes de plus de 100 000 habitants étaient correctement financées pour engager la lutte contre le réchauffement, 40% de l’objectif de réduction de gaz à effet de serre serait rempli”, a affirmé Anne Hidalgo, maire de Paris et présidente du C40, club de grandes villes contre le réchauffement climatique. Pour éviter les rigidités entourant la finance, des montages très innovants ont été présentés lors du sommet. Ainsi, le programme Urbis, mené par la Commission européenne, marie cette instance communautaire politique à l’association du pacte mondial des maires, à la Banque européenne de reconstruction et de développement (Berd) et à la Banque européenne d’investissement pour financer 600 millions d’euros de projets d’infrastructures urbaines (gestion des déchets, énergie, accès à l’eau), principalement dans les villes africaines. La fondation de l’acteur américain Sean Penn agit avec la Banque mondiale pour la reconstruction d’Haïti. La Banque mondiale et la Fondation Bloomberg s’allient pour améliorer la sécurité des routes.

Cette mobilisation mise en exergue lors du One Planet Summit reste encore très marginale dans le flot des investissements réalisés tous les ans dans le monde. Le Climate Policy Initiative l’évalue 410 milliards de dollars par an, sur un total supérieur à 3000 milliards d’investissements. Ce qui a amené le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, à espérer que rapidement tous les projets des hommes soient compatibles avec la protection de leur climat.

Par Loïc Chauveau

Source: Sciences & Avenir

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