Quel est le point commun entre Trump, Nabilla et Guy Debord? Apparemment AUCUN! Hormis le fait que ces trois personnages ont savamment su décrypter les codes de la « société du spectacle » et ont compris le potentiel de pouvoir que ces codes recèlent.

le 8 novembre 2016, à la stupeur générale Donald Trump remporte l’élection de la présidence américaine, pourtant les sondages d’opinions, les spécialistes, les médias du monde entier (du moins occidental) étaient convaincus qu’ Hillary Clinton serait largement gagnante.

Mais c’était ignorer une donnée importante de la question, quelque chose que Trump avait mieux compris et appliqué que ses adversaires,  quelque chose qui fait qu’il est dans  l’air du temps ; il a compris qu’il était dans un monde régi par l’image, dans une société du spectacle où le divertissement prime sur tout, et que la politique n’y échappait pas.

Trump, un parcours idéal !

Lorsque Trump annonce en juin 2015 sa candidature à la présidentielle, il surprend le monde entier, pourtant ce n’était que la suite logique d’un long parcours entamé des décennies plus tôt.

Les Américains le découvrent dans les années 80, à l’époque, il était connu comme le nouveau milliardaire conquérant, il incarnait la réussite à l’Américaine, dont la Trump Tower en était l’expression la plus ultime.

Dans les années 90, l’Amérique suit de près le sulfureux divorce de Donald et Ivana Trump, dont les déboires font la une des tabloïds des mois durant ; déclarations assassines, et photos compromettantes, amour, trahison, rebondissements, argent, glamour, tous les ingrédients d’un soap-opera étaient réunis.  Il est facile d’imaginer que pour le public américain,  la saga Trump était aussi « passionnante »  que la série « Dallas » ou « Les feux de l’amour ».

C’est également à cette époque qu’il fait de son nom, et de son image, son fond de commerce principal; les produits dérivés, estampillés de son patronyme, sont pléthores.

Son image fait vendre, les annonceurs le savent, plusieurs marques font appel à lui pour incarner leurs produits, il joue dans plusieurs spots publicitaires.

Il pousse l’idée un peu plus loin, et multiplie les apparitions dans les séries américaines de l’époque; Une nounou d’enfer, Sex and the city, Le prince de Bel-Air…

On le verra également au cinéma, où il fait une brève apparition dans le film « Maman, j’ai encore raté l’avion”, lors d’une scène tournée à l’hôtel Plaza, dont il était le propriétaire à l’époque. Extrait :

Son visage devient tellement connu du grand public, qu’il inspire le personnage de Daniel Clamp dans le film « Gremlins 2 »

Cependant, il faudra attendre les débuts 2000 pour voir sa popularité littéralement exploser, lorsqu’il participe à la télé-réalité The Apprentice, durant plus de 14 saisons. 20 millions de téléspectateurs suivent cette émission, Trump y était représenté sous son meilleur jour ; costume impeccable, il symbolise l’homme d’affaire aguerri et dynamique, l’homme de pouvoir qui sait ce qu’il veut, autant dire une pré-campagne électorale qui aura duré plus de 12 années consécutives.

D’ailleurs à la fin de l’émission, il  fait un teasing annonçant sa future candidature, comme si la course à la présidence était la suite logique de The Apprentice,

Vie politique et société du spectacle

« Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s’annonce comme une immense accumulation de spectacles. Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans une représentation .»

Écrivait Guy Debord dans son célèbre essai “La société du spectacle” , on peut difficilement nier que nous sommes dans l’ère du divertissement, et la politique ne déroge pas à cette règle.

Les campagnes présidentielles américaines ont toujours eu une dimension très spectaculaire, ils connaissent bien le sens de la mise en scène,  l’avènement des réseaux sociaux ne fera qu’accentuer le phénomène, la mise en scène ne se cantonne plus aux meeting et aux débats télévisés, elle devient ininterrompue, pas de place pour la subtilité, le discours est brut, manichéen.

Par ailleurs, Trump recourt souvent à  la dialectique éristique, ou l’art d’avoir raison d’Arthur Schopenhauer, il maîtrise brillamment les attaques ad-personam et ad-hominem, il n’hésite pas à  attaquer ses adversaire sur leurs physiques, à tenir des propos incohérents, blessants, grossiers. Ce qui compte ce n’est pas de répondre aux questions, mais de faire plus de bruit que interlocuteur,  le but n’est pas véritablement le débat, et encore moins la vérité, le but est de donner l’impression qu’il domine la situation et ses adversaires, ou comme l’écrivait Guy Debord :

« Le spectacle n’est pas un ensemble d’images, mais un rapport social entre des personnes, médiatisé par des images. »

Nabilla et Trump, même combat.

Nabila sein nu

Nabilla Benattia

La première est une star de la télé-réalité, le second est le 45 ème président des États-Unis d’Amérique, pourtant les deux ont bien plus de points communs qu’on pourrait le penser.

D’abord, les deux ont été stars de la télé-réalité, ce sont des personnages dans le sens le plus stricte du terme, provocateurs, impulsifs, politiquement incorrects, narcissiques, lunatiques…

Les deux sont dans l’hyperbole et l’exagération ; Nabilla ne passe pas inaperçue avec sa plastique de poupée, et ses vêtements extravagants, Trump, quant à lui, marque les esprits avec sa houppette boulonnée comme un casque sur la tête,  son goût prononcé pour la poudre de soleil, et sa gestuelle dynamique, limite agressive, lui fait occuper pleinement l’espace scénique, on ne voit plus que lui !

Tout est bon pour faire parler d’eux, ils multiplient les déclarations farfelues, et la surenchère, ils utilisent un langage assez grossier, et donnent l’impression de parler sans aucun filtre mental, de dire ce qui leurs passent par la tête : «  les Mexicains sont des dealers de drogues, les musulmans sont des terroristes, t’es une fille et t’as pas de shampoing, mais allô quoi ?! » Bref, ils ont le sens de la formule.

De même, leurs explosions de colère sont spectaculaires,  grandiloquentes, et théâtrales,  tous deux maîtrisent parfaitement l’art du clash, corollaire à celui du buzz, car le clash entraîne le buzz, et ce n’est là qu’une forme moderne de stratégie marketing, et c’est à mon sens, leur plus gros point commun.

Cela étant, l’une fait de la télé-réalité, qu’on la trouve charmante ou agaçante, ça ne changera rien à la face du monde, tandis que l’autre occupe la Maison Blanche et détient le code de l’arme nucléaire !

Par : Nesrine Briki

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